Demande de l'ONU à la junte de rétablir le droit de manifester : « les institutions internationales sont en train de prendre leur responsabilité » déclare Sékou Koundouno (Interview)
Le 13 mai 2022, l’organe dirigeant de la junte ayant renversé en septembre 2021, le président Alpha Condé avait proclamé l’interdiction,
« jusqu’aux périodes de campagne électorale » de toute manifestation sur la voie publique « de nature à compromettre la quiétude sociale et l’exécution correcte des activités » prévues dans le calendrier de transition.
En réaction à ce communiqué du CNDR, L’ONU a exhorté lundi 30 mai la junte au pouvoir en Guinée, de
« rétablir le droit de manifester sur la voie publique », après l’interdiction des manifestations à caractères politique en vigueur depuis le 13 mai.
En mission du front anti troisième mandat dans l'espace Chen ghen, Sékou Koundouno le responsable chargé des stratégies de cette entité à cœur ouvert, a réagi sur cette décision du Haut-Commissariat des Droits de l'Homme de l’ONU, ce mardi 31 mai. Pour lui, c'est tout à fait normal que l'ONU interpelle la junte guinéenne, sur cet aspect qui viole les dispositions de la charte qu'elle a, elle-même établie.
224infos.org : Le Haut-Commissariat des Droit de l'Homme de l'ONU a demandé au pouvoir actuel de Conakry … quelle réaction faites-vous de cette décision ?
Sékou Koundouno : Le Haut-Commissariat des Droits de l'Homme de l'ONU n'a pas demandé à la junte d'accepter les manifestations, mais de révoquer sa décision qui est une décision liberticide. Et qui viol à la fois la charte de la transition dans ses disposition 8 et 34 et qui viol aussi les droits fondamentaux prescrits par des traités et conventions aux quels la Guinée est signataire. Donc, en tout état de cause, nous estimons que cette mesure a été dénoncée par les avocats du FNDC en date du 26 mai et dont on a demandé une urgence du côté du Haut-Commissariat des Droits de l'Homme. Ces actions ont été prises en compte c'est pourquoi, nous demandons encore une fois de plus à la junte de faire en sorte que l'Etat de droit qui a motivé la prise du pouvoir, qu'elle puisse faire en sorte que cet état de droit soit respecté en Guinée et que des uns et des autres puissent jouir des libertés individuelle et collective auxquelles la charte même prévoit.
224infos.org : Y a-t-il une marge de manœuvre de la part de l'ONU afin de contraindre la junte à revenir sur sa décision ?
Sékou Koundouno : Ces marges de manœuvres sont nombreuses, à l'interne déjà, vous avez constaté qu'il y a tout un bouclier de dénonciation au niveau international. Les institutions internationales sont en train de prendre leur responsabilité à faire en sorte que la junte puisse garder la raison et qu'elle revienne à de meilleurs sentiments. Donc, en tout état de cause, nous continuons à faire usage de tous les moyens légaux pour faire reconnaître par la charte de la transition, mais aussi par des traités et conventions auxquelles la Guinée est signataire.
224infos.org : Ne pensez-vous pas, que suspendre les manifestations met en abris des vies vu qu'en Guinée, elles sont souvent émaillées d'incidents avec un cortège de morts d'hommes ?
Sékou Koundouno : Vous, en tant que journaliste, votre préoccupation est de chercher à identifier et à participer à la manifestation de la vérité à travers tous ceux de près ou de loin qui ont contribué à ces assassinats et meurtres ciblés. Comme vous le savez, le droit de manifester est un droit constitutionnel et universel, on ne peut pas permettre à une junte qui décide d'une durée non consensuelle, d'une durée unilatérale de la transition et faire en sorte que nous puissions nous remettre au seigneur et qu'ils disent qu'il fait plier bagage, faire en sorte qu'on accepte leur dicta. La junte est à la fois illégale et illégitime, elle n'est l'émanation d'aucun groupe guinéen. La priorité aujourd'hui, c'est de travailler, à mener des réformes structurelles, des réformes qui puissent aboutir au retour à l'ordre constitutionnel pour que les guinéens choisissent librement les hommes et les femmes qui doivent les gouvernés.
224infos.org : Au cas où le CNRD ne cède pas à cette décision, a quoi peut-on s'attendre du FNDC ?
Sékou Koundouno : Nous continuerons à faire des plaidoyers comme nous le faisions déjà à travers la tournée que nous menons. Et après la tournée ouest-africaine, nous sommes en train de mener une tournée du côté de l'espace Cheng Ghen. Nous venons de Bruxelles et actuellement, nous somme du côté de Paris. C'est de faire en sorte que nous puissions sensibiliser les amis de la Guinée pour qu'ils parlent à la junte qu'elle sache raison garder et de faire en sorte que la Guinée puisse connaître une transition apaisée, inclusif. Une transition dans laquelle nous allons sortir dans une réussite totale. Mais à défaut, nous ferons usage de tous les moyens légaux qui sont reconnus par la charte.
224infos.org : En clair ! Peut-on s'attendre à une manifestation de la part du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC) les prochains jours ?
Sékou Koundouno : Cela n'est pas du tout exclu parce que ces manifestations sont totalement reconnues par des traités et conventions. Et au moment opportun, nos avocats et nous-même aviserons qui de droit pour les tenir informés. Et comme vous le savez déjà, nos avocats ont mis en place un dispositif pour répertorier tous les écrits et discours qui tendent à préparer la répression des futures manifestations afin de faciliter le travail au Procureur Général Près la Cour d'Appel de Conakry.
Interview réalisée par Moussa Timak, pour 224infos.org